Les soirées networking vous épuisent, vous n’aimez pas relancer les gens sans raisons impérieuses, d’ailleurs, vous mettre en avant devant des inconnus vous semble tout à fait inconvenant… bref, vous n’aimez pas réseauter ! Et s’il existait une autre méthode plus adaptée aux introvertis ? Voici comment repenser le développement de votre réseau.
Extrait de Cultiver son réseau quand on déteste réseauter, de Devora Zack, ESF Editeur, janvier 2011.
Accumuler ou approfondir
Pour réussir votre réseautage, il vous faut être fidèle à vous-même. Vous êtes la fondation sur laquelle construire. Chercher à vous transformer en une autre sorte de personne serait une aventure périlleuse, qui vous laisserait troublé, égaré et, pour tout dire, lessivé. Je ne peux pas approuver un comportement aussi téméraire.
Pourquoi ne pas vous réjouir de qui vous êtes ? Cela ne vous semble-t-il pas plaisant, relaxant et valorisant ? La réussite se fonde en premier lieu sur l’authenticité. Si vous ne savez plus où donner de la tête, cherchez d’abord à apprécier ce que vous faites au lieu de vous arrêter à ce que vous devriez faire.
« Devriez » n’est pas un mot très inspirant (on ne devrait jamais dire « devrait »). Vous n’avez pas beaucoup de relations ? Revoyez la définition du mot « relation ». Vous êtes introverti ? Voilà qui est fantastique : vous êtes bien placé pour vous imposer comme un maître incontesté du réseautage ! Entre le réseautage des introvertis et celui des extravertis, la différence essentielle se résume à ceci : Les extravertis accumulent ; les introvertis approfondissent.
Si vous êtes un introverti, il se peut que vous ayez le souvenir désagréable d’une réunion d’entreprise où vous faisiez tapisserie. Vous regardiez les extravertis évoluer dans la salle et enrichir leurs collections — de contacts, de cartes de visite et de cure-dents piqués sur le buffet. Ce spectacle vous a peut-être convaincu de votre infériorité, et cette pensée vous a traversé l’esprit : « Je ne veux pas parler à ces gens-là, et eux non plus ne veulent pas me parler. Autant filer. ».
Les vieilles règles ne sont pas mauvaises en soi ; seulement, elles ont leurs limites. Elles fonctionnent pour les quelque 30 % de la population qui se définit comme fortement extravertie. Mais elles ne comportent aucun avantage direct pour les centrovertis (20 % d’extravertis modérés/faibles + 20 % d’introvertis modérés/faibles) ou pour les introvertis. Nos nouvelles règles, elles, sont conçues pour avantager les introvertis, les centrovertis et même bon nombre d’extravertis confirmés. Joignez-vous à moi pour ébranler les trois prémisses de réseautage de la vieille école.
Vieille règle poussiéreuse n° 1 :
foncer (bavarder)
Inutile de tourner autour du pot. Reconnaissons les faits : les extravertis ont du bagout. Vous, les introvertis, cessez d’en faire un drame ! Concédez aimablement ce point. Les extravertis parlent pour penser. Cette habitude suscite parfois l’irritation des introvertis et, d’autres fois, leur envie. De fait, grâce à leur flot ininterrompu de propos amicaux, les extravertis sont en mesure de soutenir une conversation, d’animer une discussion et de prolonger une activité. Ils le savent, et les introvertis le savent aussi ; autant l’accepter tous autant que nous sommes. S’imposer dans des situations ou dans des discussions, c’est une façon d’établir des relations. Les extravertis sont très à l’aise lorsque vient le temps de s’entretenir avec des gens qui leur sont pratiquement étrangers — et qu’ils appellent de nouveaux amis. Ils passent le plus de temps possible à s’entretenir avec d’autres personnes. Aussi, la vieille règle n°1 convient-elle parfaitement à un verbomoteur, qui peut foncer sur cette base. Qu’en est-il de tous les autres ?
Nouvelle règle n° 1 : prendre le temps de réfléchir (tâter le terrain)
Quand je demande aux extravertis quels sont les points forts des introvertis, ils évoquent invariablement la qualité de leur écoute, ainsi que leur grande compé- tence en matière de planification. Les extravertis semblent reconnaître que les introvertis ont une nette supériorité dans ces domaines, et admettent volontiers qu’ils auraient eux-mêmes besoin de progresser sur ces points-là. Bien sûr, il ne s’agit pas d’une compétition. En tant qu’introverti, je pense avant de parler. Être conscient de cela me permet de transformer en compétence ce qui pourrait être une carence. Avant d’assister à une réunion à titre de consultante ou de coach, je consacre beaucoup de temps à revoir mes stratégies et à préparer mes réponses. En me conformant à ma première nouvelle règle de réseautage — prendre le temps de réfléchir —, je suis en mesure de communiquer mes idées avec clarté et précision. Comme le faisait remarquer un de mes anciens clients, « c’est surtout en observant, non en parlant, que nous apprenons ». Si vous n’êtes pas doué pour le bavardage, concentrez-vous sur le don que vous avez — cette prédisposition à observer et à rassembler des données.
Notes de terrain : Le silence est d’or
J’animais un jour un programme pour des ingénieurs intitulé « Communication et style de personnalité ». La direction de leur société avait décrété ce séminaire obligatoire. Jusqu’à 95 % des participants se définissaient comme introvertis ou centrovertis. Tous répondaient à mes questions par de longs silences. Nous avons donc vite expédié l’ordre du jour.
Heureusement, je savais qu’il ne fallait pas considérer ce comportement comme négatif, apathique ou décourageant. Je m’accommode volontiers du silence dont ont besoin les introvertis pour assimiler. Par des indices tacites, les participants montraient qu’ils s’intéressaient vivement aux questions abordées durant le cours. Et dès la première pause café, les participants m’ont bombardée de questions — en tête-à-tête. À l’heure du déjeuner, j’ai à peine pu me libérer pour avaler une bouchée. Les membres introvertis et centrovertis du groupe étaient résolus à discuter des concepts que j’avais présentés et à creuser les sujets que nous avions étudiés.
Finalement, presque toutes les questions des participants m’ont été posées entre les cours, pendant les pauses !
Vieille règle poussiéreuse n° 2 : faire sa propre publicité (se mettre en avant)
Les grands extravertis se mettent plus naturellement en avant que les introvertis. C’est là une stratégie de réseautage valable. Elle est particulièrement indiquée dans le cas des personnes qui, par nature, ont la langue bien pendue.
Voici quelques conseils que j’ai réellement entendus à ce propos :
- Assurez votre visibilité en tout temps.
- Vantez vos réalisations à tout propos.
- Cherchez toujours à approcher les autres.
- Maintenez un rapport constant avec vos relations.
- Tenez les autres au courant de vos succès.
L’extraverti est porté d’emblée à étendre ses réseaux. Faire sa propre publicité est un corollaire naturel de cette prédisposition. Dans bien des cas, l’extraverti passe de l’auto-publicité à la promotion d’organismes économiques ou communautaires prometteur. Une de mes clientes de toujours, une extravertie des plus sympathique, est directrice générale d’un organisme sans but lucratif. Quand je lui ai dit que je rédigeais un livre sur le réseautage et plus spécifiquement pour ceux qui n’aimaient pas réseauter, elle a éclaté de rire. « Comment pourrait-on détester le réseautage ? C’est l’aspect de mon boulot que je préfère. J’adore ça ! Le réseautage, c’est la récompense de tout le reste du travail que je fournis. » Elle a reconnu, cependant, qu’elle aurait besoin de lire mon ouvrage pour mieux comprendre l’équipe d’introvertis et de centrovertis dont elle s’était entourée.
Nouvelle règle n° 2 : assimiler (se concentrer)
Les introvertis et les centrovertis se sentent souvent mal à l’aise quand il s’agit de parler d’eux-mêmes. Ils sont d’avis que bien des questions sont des affaires personnelles. Il leur semblerait impensable d’entamer une relation en évoquant toutes leurs qualités. Pourtant, quand ils carburent à plein régime, les introvertis peuvent apprendre énormément de choses au sujet des personnes qu’ils viennent de rencontrer. L’assimilation de l’information leur permet d’établir des relations profondes et durables, tout en passant moins de temps à se faire valoir.
Notes de terrain : Les eaux calmes sont profondes
J’ai fait la connaissance de Luc à l’occasion d’un séminaire sur le leadership que j’animais pour 70 avocats. Le séminaire avait lieu dans un centre de villégiature luxueux situé au bord d’un lac. Durant le dîner d’ouverture, qui était servi à de grandes tables de banquet, Luc s’est montré tranquille et réservé.
Le matin du deuxième jour, la réunion devait se dérouler à l’extérieur. Comme elle exigeait un travail de préparation important, je suis arrivée tôt sur les lieux. Luc était le premier participant à se présenter — une bonne demi-heure avant le début du programme. Il a proposé de m’aider et s’y est mis avec entrain.
Je lui ai demandé ce qu’il avait fait la veille après le dîner. Un peu embarrassé, il m’a dit qu’il s’était assis près du lac et qu’il avait regardé l’eau. Comme s’il s’excusait, il m’a confié ceci : « Parfois, j’aime m’asseoir et regarder, tout simplement, le paysage. » Il a précisé que les échanges de banalités l’épuisaient et qu’il préférait passer seul les pauses entre les séances. S’il s’était présenté tôt ce matin-là, m’a-t-il dit, c’est qu’il avait pris son petit-déjeuner avant l’arrivée des autres. Il voulait se ménager un moment seul avec son journal, sans être dérangé par des collègues bien intentionnés qui viendraient se joindre à lui.
Devenu plutôt loquace, Luc m’a expliqué que les gens devaient sans doute le trouver quelconque à première vue. Pourtant, il était clair, d’après notre conversation, qu’il était profond, perspicace et doté d’un bon sens de l’humour. J’ai appris par la suite que ces qualités avaient contribué à son succès professionnel. Luc était à la tête d’une équipe de cinq avocats et occupait une position de leadership enviée.
À la fin du programme, Luc m’a fourni un compte rendu détaillé du séminaire, avec ses feedbacks, ses réflexions et ses recommandations. Luc présente les caractéristiques d’un grand introverti. Il excelle dans les tête-à-tête. Il s’ouvre volontiers — quand il est certain que la situation s’y prête. On est d’autant plus satisfait de découvrir sa richesse intime qu’elle échappe au premier regard. Luc pense avant de parler et écrit avec une clarté exceptionnelle. Comme dans le cas d’un grand nombre d’introvertis, il faut apprendre à le connaître pour percer sa carapace. Quand nous permettons aux introvertis de se dévoiler à leur propre rythme, nous en sommes récompensés.
La question des questions
Si vous êtes introverti, exploitez à fond vos fabuleux talents. Les introvertis préfèrent, en général, poser des questions plutôt que révéler des renseignements personnels. Mettez en jeu votre grande capacité de concentration, associez à votre écoute approfondie des questions bien formulées, et vous n’aurez plus jamais la moindre peine à engager et tenir une discussion. En outre, votre sens aigu de l’observation, qui vous fait remarquer des choses subtiles, de nature verbale ou non verbale (regard, qualité de l’attention), vous permet aussi, au cours de vos échanges, d’amasser énormément de données tout en poursuivant votre réseautage.
Posez moins de questions fermées (on entend par là les questions auxquelles on ne peut répondre que par oui ou par non) et plus de questions ouvertes (c’est-à-dire celles qui appellent une réponse élaborée, permettant ainsi d’obtenir une foule de renseignements). Envisagez donc de remplacer des questions comme « aimez-vous travailler ? » par d’autres comme
« qu’est-ce qui vous plaît le plus de votre travail ? ». Sachez qu’une question commençant par pourquoi tend à mettre sur la défensive la personne qu’on interroge. Autant que possible, remplacez ce pourquoi par comment ou quoi. Ainsi, au lieu de demander : « Pourquoi avez-vous quitté votre emploi ? », dites :
« Qu’est-ce qui vous a amené à réorienter votre carrière ? »
Les questions bien formulées amènent l’autre à s’ouvrir. Souvenez-vous d’une rencontre vous ayant laissé une impression agréable : il y a de fortes chances pour que votre interlocuteur vous ait manifesté de l’intérêt lors de cette rencontre. Une écoute attentive de l’autre montre l’attention qu’on lui porte – ce qui est un moyen inégalable pour faire soi-même bonne impression.
Il m’est arrivé d’entendre décrire ainsi une collègue : « Elle est réservée, mais je trouve qu’elle est intelligente. » Ce « mais » m’a frappée. Comme si la réserve et l’intelligence étaient incompatibles ! J’ai plutôt constaté que les personnes à première vue réservées manifestent généralement une expérience, des talents et une personnalité du plus grand intérêt.
Vieille règle poussiéreuse n° 3 : passer autant de temps que possible avec les autres (faire la fête)
Ce conseil équivaut au premier critère d’admissibilité à Planète Extra : être sociable. Les extravertis se requinquent en passant régulièrement beaucoup de temps avec beau- coup de gens.
Alors que je m’entretenais un jour avec une extravertie, j’ai été étonnée de l’entendre dire combien elle aimait faire des excursions d’une journée avec des gens qu’elle ne connaissait pas. Comme je voulais en savoir plus sur ce point, elle a ajouté : « Eh oui ! Je monte tout simplement dans un car de tourisme, et je passe le reste de la journée à bavarder avec la personne qui se trouve assise à mes côtés. C’est génial. »
Le fait de se joindre à des groupes, à des associations et à des équipes est un moyen, pour l’extraverti, de raviver son entrain. Être en contact avec les autres lui donne une bonne dose d’énergie, il serait donc impensable et improductif pour lui de s’enfermer seul dans une chambre d’hôtel à l’occasion d’un voyage d’affaires.
Les extravertis s’épanouissent quand ils sont entourés de gens et occupés par mille activités.
Rejoignez les habitants de la Planète Extra ! À vous le succès ultime et le vrai bonheur, grâce à une interaction sociale débordante ! Plus on est de fous, plus on rit. En avant la fête.
Nouvelle règle n° 3 : suivre son propre rythme (se ménager)
Les introvertis et les centrovertis se montrent habiles quand ils participent à des conversations intelligentes, à des activités structurées et à des travaux bien ciblés. Mener ces activités à leur propre rythme leur permet de se ménager du temps pour recharger leurs batteries. Ils deviennent alors de vraies dynamos du réseautage.