Ecopolis, c’est une sorte un think tank de la construction écologique. Des artisans, architectes, laboratoires de recherches, institutionnels sont parvenus à organiser un partage d’information à l’échelle nationale sur un mode totalement informel. Deux des fondateurs expliquent comment ils sont devenus l’une des rares structures qui puisse répondre aux appels d’offres de communes en matière d’habitat basse consommation.
Une mutualisation de R&D à l’échelle nationale
« Notre réseau, c’est un peu comme un groupe d’amis, nous sommes constamment reliés, mais il n’y a ni formalités, ni structure » indique Olivier Legrand cofondateur du réseau Ecopolis. Les fondateurs du réseau décident dans un 1er temps de partager toutes leurs informations, « honnêtement et sans intentions commerciales » précise-t-il. En 2005, ils sont plusieurs entrepreneurs à vouloir se positionner sur le marché de la performance thermique des habitations. « Nous avions des difficultés à trouver une information technique fiable sur les matériaux et les procédés innovants. Et les investissements en R&D étaient trop lourds pour des petites structures comme les nôtres. »
C’est la naissance du réseau Ecopolis. Un simple partage d’informations entre professionnels, sans structure juridique. Les membres sont reliés par une mailing-list et disposent des coordonnées des uns et des autres. Un fonctionnement simple avec un seul principe appliqué avec rigueur : tout membre doit accepter de partager ses infos, ses expériences, même s’il est concurrent d’un autre membre : « de toute façon ceux qui ne jouent pas le jeu sont vite repérés et n’ont pas leur place dans le groupe ».
Difficile d’imaginer une telle organisation répartie aux quatre coins du territoire, « pourtant, nous nous voyons tout le temps » rapporte Claude Durain, dirigeant de la société Cotralim et cofondateur du réseau. « Il suffit d’un coup de fil pour profiter de l’avis d’un entrepreneur qui a testé une technologie sur un chantier, solliciter un laboratoire de recherches associé au groupe… » Lorsque la demande suppose un véritable investissement en temps de la part d’un membre, une facturation classique règle la relation entre les deux entreprises.
Aujourd’hui, ils sont une centaine d’entreprises à collaborer ensemble sur la construction de maisons, voire de villages. Ecopolis, en mutualisant des équipes d’artisans, architectes et chercheurs est une des rares structures qui puisse répondre aux appels d’offres de communes en matière d’habitat basse consommation.
En 2011, Ecopolis construit un 1er Village Cocooning dans le Loiret. Deux autres sont en préparation dans l’Oise et les Vosges.
« Le partage d’informations et l’échange régulier stimule l’entreprise personnelle de chacun. »
Lorsqu’il rachète l’entreprise de construction Cotralim en 2007, Claude Durain veut s’implanter sur le marché des maisons passives, très économes en énergie grâce à des procédés d’isolation naturels innovants. Il faut former les salariés à l’utilisation de nouveaux matériaux et adapter les méthodes d’installation. « C’est le réseau Ecopolis qui m’a permis de trouver l’information nécessaire à la création de cette nouvelle activité qui nous rapporte déjà 24% de CA en plus par an. » Pour 2012, plus de 5 nouveaux chantiers sont déjà signés, « comparés à bien d’autres entrepreneurs, je suis plutôt serein pour l’avenir ! » conclut le dirigeant.
Un tremplin technique pour l’entreprise
Le laboratoire ENSIB d’Epinal, spécialisé dans l’étude des matériaux bio-sourcés, membre d’Ecopolis, forme gratuitement pendant 2 jours les salariés de l’entreprise Cotralim.
En 2011, Cotralim construit une maison certifiée passive à 95%. Une performance qui fait de cette entreprise de 33 salariés une pionnière sur son marché.
Une collaboration continue entre membres
« Désormais, les membres du réseau Ecopolis sont des collègues, nous ne sommes plus sous-traitants ou concurrents. » déclare Claure Durain. Lorsqu’il fait des tests d’étanchéité d’une maison, il invite d’autres membres pour qu’ils puissent profiter de l’expérience acquise. Au besoin, il sait qu’il peut compter sur eux pour leur confier ses clients.
Une motivation nouvelle pour les entrepreneurs
« Le réseau est une vraie motivation. Je sais pouvoir compter sur l’aide d’autres entrepreneurs qui partagent ma vision du métier. D’ailleurs sans Ecopolis, je n’aurais sans doute pas osé créer un bureau d’études au sein de ma société. » Un investissement représentant près de 8% du CA annuel avec recrutement d’ingénieurs à la clé.
Ecopolis, un réseau sans structure qui bâtit des villages…
Pour les cofondateurs du réseau, une structure trop organisée pourrait nuire à la facilité des échanges. Au contraire pour Olivier Legrand, « Ecopolis, c’est un laboratoire de R&D partagé, mais sans les inconvénients de la structure. Une hiérarchie entre nous serait un frein au partage d’information. » Résultat, pas de frais d’adhésion pour les membres, pas d’agenda de réseau à gérer, … chacun y gagne ce qu’il apporte en prenant lui-même l’initiative des contacts.
Et ça marche ! En 5 ans, le réseau a su rassembler suffisamment de savoir-faire techniques pour construire des maisons consommant moins 15 kilowatts d’énergie par heure (kWh). Aujourd’hui, les Français consomment en moyenne 240 kWh/m²/an dans une maison traditionnelle.
Ecopolis en bref :
- Recrutement des membres : concerté entre les entrepreneurs déjà intégrés.
- Seule condition pour devenir membre et le rester : partager ses informations.
- Clés de fonctionnement :
– pas de concurrence géographique immédiate entre les membres,
– pas de formalisme.
Les idées clés de l’article :
- Un réseau sans structure juridique, ni fonctionnement organisé peut réussir à collaborer sur des projets très concrets.
- Une règle clé pour de tels réseaux, une transparence totale entre membres.